La ville au bord de l’eau

La ville au bord de l’eau
La ville au bord de l’eau huile sur toile, 1947 Donation Pierre et Kathleen Granville, 1969 © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay © ADAGP, Paris

jeudi 7 octobre 2010

Protection de l'orphelin

Quand la vénitienne dont le masque ne suppose nulle angoisse aura, sous ses jupes surfilées d’or, donné naissance à la grimace de poupon dont les pleurs éclateront près des lions de pierre, on verra, passé Carnaval et le gel sur le canal, accourir de probes magistrats qui scruteront les traits du jeune bâtard, inquiets de ce miroir de chair rose. Sa nourrice sera ce gros homme travesti dont la fortune est assurée mais qu’importe si porter la robe et montrer sa mamelle sont conditions nécessaires pour approcher celle dont le ventre s’est refermé comme la mer se retire ? D’autres, jadis, se sont humiliés bien davantage pour un sourire sur ce masque blanc, d’autres lui en veulent au point qu’il faut craindre pour l’enfant, le garder des caresses avunculaires, d’autres encore le tiendront pour le mal en personne. Je prendrai l’enfant de mes mains amères, je calmerai ses vagissements d’une berceuse ancienne, je lui dirai bienvenue petit frère, ne pleure pas le poids d’Anchise, tes épaules ne ploieront pas sous le joug du vieillard, et ce que tu supporteras sera le fardeau de ton choix. Je lui montrerai mon dos tanné, j’en plaisanterai comme d’un jeu cruel. Et cet enfant roux rira comme on chante.

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