La ville au bord de l’eau

La ville au bord de l’eau
La ville au bord de l’eau huile sur toile, 1947 Donation Pierre et Kathleen Granville, 1969 © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay © ADAGP, Paris

lundi 1 mai 2017

Le mal est fait

Le jardin des fruits n'eut rien de l'Eden, ou si l'Eden c'est l'ennui, alors peut-être en fut-il ainsi. On nous lâchait dans le jardin, on nous enjoignait d'aller jouer, maman redevenait fille de sa mère, quant au père il partait marcher loin, nous n'étions pas sans l'envier de pouvoir quitter la maison où nous avons appris l'ennui. Faute de mieux le jardin, guetter les passants depuis la balustre, Marie-la-folle avec son béret beige, pourquoi je raconte cela? Cela t'avait surpris, lorsque pendant tes derniers jours, je t'avais apporté des textes, montré ce que j'avais écrit de notre enfance, l'importance du jardin, Honfleur plus régulièrement que la villa du Croisic, ce n'était pas faux ce que j'évoquais, simplement ce n'était pas non plus ton souvenir, ton point de vue. Je t'ai promis d'équilibrer, la villa s'était envolée, j'avais travaillé à l'oubli, toi tu y étais retournée, il a fallu se souvenir et tenir parole. Pourtant ce jardin j'y reviens, tu comprendrais pourquoi, c'est là que le père agressa Claire, une partie de cache-cache, je m'étais bien caché, je n'ai rien vu, je n'ai rien su, c'est Claire qui te l'a raconté bien après, lorsqu'avec les années tu trouvas la force de dire ce qu'il t'avait fait. Le jardin des fruits fut le jardin de sa faute, Eden brisé de son fait, Eden dont je le chasse à jamais mais trop tard.

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