La ville au bord de l’eau

La ville au bord de l’eau
La ville au bord de l’eau huile sur toile, 1947 Donation Pierre et Kathleen Granville, 1969 © Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay © ADAGP, Paris

samedi 3 septembre 2016

C'est encore l'été

La douceur du matin, rouler vers le marché sur les feuilles grillées des châtaigniers surpris par la chaleur, penser à toi: tu aurais acheté à nouveau des melons, je n'aime pas trop ça. On serait tombé d'accord sur la courge spaghetti, après s'être demandé si ce n'était pas un peu tôt, c'est encore l'été, n'est-ce pas? Le ciel me répond oui, puisque tu ne réponds pas. Je l'ai pourtant prise, la courge spaghetti, je la cuisinerai comme tu aimes, avec un peu de crème, une pincée de muscade, beaucoup de parmesan. Avec qui la mangerai-je? Je ne sais pas, rien ne presse, la courge spaghetti se conserve longtemps. J'ai cherché des crevettes, je n'en ai pas trouvé, la poissonnière au bras tatoué m'a dit qu'il avait fait trop chaud, pas de beurre fermier non plus, pour les mêmes raisons: il n'y a plus d'herbe dans les prés, les vaches donnent moins de lait, la Normandie est stupéfiée par le soleil, la Normandie attend la pluie qui se fait désirer. Me revient alors le souvenir de la canicule, celle qui avait tué tant de vieux, un souvenir de septembre où l'eau était tiède à Houlgate, et les pelouses comme un tapis jaune entre Cancale et Saint-Malo, où nous nous étions retrouvés un week-end. C'était l'année où des enfants pataugeaient, bronzés comme des caramels, dans ce qu'il restait de la Vérone, près du petit pont sous les noisetiers, entre Saint Martin-Saint Firmin et Saint Etienne l'Allier, nous allions nous y promener quand vous veniez, il y a longtemps déjà, tu ne viendras plus. Sans toi les saisons se dérèglent, peu de fruits cette année mais du raisin précoce. Je suis rentré avec la courge, des prunes de Jumièges, les premières pommes qui moussent quand on les compote, pour retrouver le goût des fruits.

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