Ces photos prises en classe, photos de classes, portraits de fratries aux couleurs passées depuis longtemps, et mon souvenir encore plus flou du banc où je posais à califourchon -position d'aîné- tandis qu'assise tu faisais face, ces photos objectives, comme telles, disent peu de nous, enfants des années 70, enfants dociles et patients. Tu es si sérieuse, je suis un peu absent, nous attendons que ça passe et seul ton épi se rebelle qui jaillit de tes cheveux courts. Tes yeux presque verts regardent droit devant, les miens ne fixent rien. Les parents tous les ans achètent un tirage, qu'ils envoient à leurs parents, comme ils sont beaux, comme ils sont sages comme des images. Les photos mentent évidemment qui figent les enfants, les bras croisés sur les tables d'école trouées sur la droite pour l'encrier de verre ou de porcelaine. Sur l'une d'entre elles, on reconnaît Laurent l'ami d'enfance et de toujours, qui était dans ta classe et qui raconte encore comment juste avant la sortie de quatre heures et demie, tu te tenais, bras croisés, le doigt sur les lèvres, si parfaitement calme que tu étais la première à sortir de la classe, exemplaire, énervante dit-il aussi. Nos tabliers d'écoliers propres, nos cahiers bien tenus -surtout le tien, gaucher moi je fais des pâtés- nos kabigs de feutre, tout cela si parfaitement lisse, tout cela sans doute un peu faux.
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