Nicolas de Staël, Face au Havre

Nicolas de Staël, Face au Havre
Nicolas de Staël, Face au Havre

vendredi 10 décembre 2010

Le sens de la marche

Ici, glaise et silex, le pas blesse le pas pèse, mais nous marchons sous la futaie tremblante, verte encore de cette pluie douce qui retarde le gel. Vertes les gerçures qui lézardent nos jeans. Ocres de glaise, nos bottes alourdies. Nous n'oublions rien dans la marche, nous ne voulons rien oublier, nous continuons de marcher ensemble. Nos couteaux lestent nos poches de velours. Ouvertes, nos paupières pourtant ne nous sont pas blessures. Nous regardons entre nous et les choses ce qui, indéfiniment, sépare et relie dans le même mouvement de cils. Renonçant à trancher, nos couteaux pliés dans les poches, nulle inscription sur l'arbre, nul amer gravé dans l'écorce, nous marchons, nous regardons.
Ce que nous voulons comprendre est infime, nous échappe, et nul doute qu'il se briserait si nous le touchions de nos doigts gourds, mais nous ne voulons pas toucher. Ce que nous aimons, c'est l'échappement même. Cet élan-là nous mène et c'est ainsi que nous marchons.

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