Nicolas de Staël, Face au Havre

Nicolas de Staël, Face au Havre
Nicolas de Staël, Face au Havre

dimanche 25 avril 2021

Vivre sans

 Ma très vieille tante classe des photos, ça la fait  pleurer, le vieil oncle est mort qui les avait prises, il en prenait tout le temps, pas toutes rangées loin s'en faut, qu'il était beau me dit-elle, bon il est peu sur les photos puisqu'il les prenait mais j'en ai quand même, même sur son lit de mort il est resté très beau, Claire a pris une photo, tu verrais, c'est vrai, quand tu viendras je te montrerai je sais bien que tu ne peux pas, tu viendras quand ce sera fini tout ça, tu t'es fait vacciner au moins?  La première injection, c'est déjà ça, moi je n'ai rien senti, rien, il faut rester très prudent, en plus maintenant ces variants, le Brésil ces pauvres gens, Bolsonaro c'est une arsouille, comme ça qu'on disait à Honfleur, est-ce qu'on le dit encore? Les pommiers sont en fleurs, il a gelé, elles seront rares les pommes cette année, sur les photos de Jean des violons de son atelier les enfants, moi bien-sûr, moi j'étais sa moitié, la moitié de sa vie c'est pour ça que c'est dur, les photos elles me font pleurer, je pleure j'ai été si heureuse.

3 commentaires:

  1. Et quand il n'y a plus de vieille tante, quand le "plus vieux que nous" s'en va flotter dans un océan silencieux, ces photos mal rangées nous échoient comme des objets flottés ramenés par la marée. Des pièces de puzzle qu'on tente parfois de reconstituer, condition pour nous permettre de nous inscrire dans une histoire ou pour nous en séparer: c'est au choix. Mais je me demande ce que feront les nouvelles générations de cette surabondance de prises de vue qui saisissent chaque instant, sans hiérarchie du premier pas à l'assiette de pâtes? Un océan uniformément recouvert d'objets flottés? Est-ce la peur du silence?

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    1. La profusion nuit au sens, et la dématérialisation de la photo la "dé-réalise" d'où en effet bien des questions qui attendent ceux qui nous succéderont quant à l'image/souvenir...

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  2. Traduction en oc de Stéphane Lombardo:

    Viure sensa

    Ma tanta mai vièlha classa de fotos, aquò la fai se plorar, l'oncle vièlh es mòrt que leis aviá presas, ne'n preniá de lònga, totei son pas redriçadas, luenh d'aquò, coma èra bèu, me ditz, vai, es gaire sus lei fotos bòrd que lei preniá mai n'ai pasmens, e mai sus son liech de mòrt a restat fòrça bèu, Claire prenguèt una foto, veiriás, es verai, quand vendràs te farai veire sabe ben que pòs pas, vendràs quand serà acabat tot aquò, te siás fach vaccinar au manca ? La premiera injeccion, es ja aquò, ieu ai pas sentit ren, ren, se cau prendre garda, en mai ara aquestei variants, Brasiu aquelei paurei gens, Bolsonara es un bagassier, coma aquò que se disiá a Honfleur, se ditz encara ? Lei pomiers son en flors, a jalat, n'i aura gaire de poms ongan, sus lei fotos de Jean de violon de son talher lei pichòts, ieu segur, ieu ère sa mitat, la mitat de sa vida es per aquò qu'es dur, me fan plorar lei fotos, plore de tant fuguère urosa.

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