Ronde jaune et orange

Ronde jaune et orange
Arpad Szenès, Ronde jaune et orange, 1955

dimanche 23 novembre 2025

Course à l'hiver

 La lumière perdue, la flamme éteinte, pas dans la nuit que nul n'éclaire, le court-circuit du vieux lampadaire, ici l'ombre de l'ombre de la pluie, le jour le gris d'un gris que seule la neige, hier, a éclairci avant à son tour de se fondre dans l'ombre de la nuit reconduite. Le paysage, c'est l'âme de temps qu'on n'a pas choisis, griffes d'arbres nus, feuilles noircies chues dans la mare, le rose indécent de la dernière rose dite Pierre de Ronsard, saisie par le gel, guimauve oubliée à la fête foraine. Il n'en restera rien demain, ce lendemain plus court qu'hier, cette course à l'hiver, litanies de jours sans fleurs. On prétend que c'est nécessaire, le froid tue les vers dans les fruits pourris, protège les arbres des parasites qui les guettent, admettons. Le général hiver, la trêve hivernale, la magie de Noël, la trêve des confiseurs, les vœux pour l'an neuf sous le gui, tout cet accablant attirail de paralysie consentie et d'affections confites, tout cela pour qu'à la débâcle, à la reverdie, aux premières jonquilles, au moindre prétexte, coup de chasse-mouche, assassinat d'archiduc, on rompe les trêves, on brise les barrages et les vieilles alliances, pour céder au spasme que chacun pressent, dont nul ne reviendra.

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