Nicolas de Staël, Face au Havre

Nicolas de Staël, Face au Havre
Nicolas de Staël, Face au Havre

jeudi 21 avril 2016

"Dégommons ce connard de dieu"

Le matin qui suivit ta mort, je suis allé chercher des croissants à la boulangerie Porte Saint Vincent, suis remonté à la Garenne. Rentré chez toi je me suis assis dans la cuisine et j'ai attendu que tes enfants se lèvent pour leur apprendre ton décès, puisque plus rien alors n'était urgent, et que plus rien ne m'était plus précieux que leur sommeil. Thalie s'est levée la première, et je lui ai dit que tu étais morte et ce fut tout, puisqu'elle savait l'échéance imminente, et qu'elle s'est toujours tenue droite. Sont venus ensuite et Bastien et Thibaud, et je leur ai dit et là aussi ce fut tout. Philippe est rentré de l'hôpital avec le sac de tes affaires, et Thalie a cru pouvoir ranger et elle ne l'a pas pu et ce fut la seule fois où je l'ai vu pleurer. Quand j'ai écrit le texte à lire pour la cérémonie, ce memento qui ne regarde que ceux qui t'accompagnèrent, je l'ai lu à chacun d'entre nous. Je suis monté à l'étage où Thalie était dans sa chambre. Elle a écouté, puis approuvé. Placardée au-dessus de son bureau, une petite feuille où elle avait inscrit le seul vers que je lui connaisse: "Dégommons ce connard de dieu". 
A Noël, nous avons fui la maison pour Vienne, vu les musées, j'ai ronflé à les empêcher de dormir. Dans les toilettes d'un restaurant japonais, des cartes postales offertes ont retenu notre regard, il y était écrit: "Fuck 2015" et c'était tout. Nous n'avons rien dit mais en avons pris un stock. Et ce fut tout.

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