Nicolas de Staël, Face au Havre

Nicolas de Staël, Face au Havre
Nicolas de Staël, Face au Havre

dimanche 24 novembre 2013

Le front sur la buée

La pluie coule et brouille les contours du petit monde où je me tiens debout, le front collé à la sueur de la vitre.
La pluie brouille le jardin d'en face et le visage des aimés coule vers la gouttière mais je ne pleure plus, j'ai la cornée rouge à force d'être sèche et sous la pluie je n'y vois pas plus clair, et les parfums d'été n'y sont plus exhalés.
La pluie coule et croule le petit monde qui me tient, que debout je soutiens le front collé au plafond des rêves. Cariatide de mon temple intenable, je porte, je supporte, mais les morts s'amoncellent et je chancelle à mon tour.
La pluie brouille le dessin pur qu'avait tracé mon doigt sur la vitre, dans ma sueur, la pluie noie le petit monde où j'avais cru trouver refuge. Mais de ces crues-là, on sait depuis longtemps qu'elles submergent et laissent à jamais sans asile.

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