Nicolas de Staël, Face au Havre

Nicolas de Staël, Face au Havre
Nicolas de Staël, Face au Havre

samedi 12 février 2011

Loin

La mer ment de tous ses prestiges, les côtes plus encore, que seul semble éloigner le regard myope qui sait le prix de son désir. On étouffe à Tanger, la ville est morte à elle-même, et pour un souffle, des enfants s'exercent à l'acrobatie : on ne peut respirer que démantibulé. La brume s'abat sur le port, et reste dans la médina l'écume noire de la misère : souvenirs d'Afrique, une casserole abandonnée sur un réchaud. Chercher l'ombre hachée des eucalyptus.
Vous partirez sur la mer menteuse, convoyés par les négriers éternels qui vous foutront à l'eau, loin de Gibraltar (c'est le nom que vous donnez au désir), pas si loin de Tanger que vous n'y retourniez vous brûler les yeux dos à la ville, face à la mer. Vous repartirez. La Guardia Civil ne compte plus vos cadavres. Vous repartirez. Saïd le myope, lui ne se verra pas mourir, Saïd, au moins, il aura respiré avant.

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