Nicolas de Staël, Face au Havre

Nicolas de Staël, Face au Havre
Nicolas de Staël, Face au Havre

samedi 6 novembre 2010

Ce qui a disparu

Tout avait changé dans la ville, et jusqu'au nom des rues, aux raisons des bâtiments qu'elle ne reconnaissait pas : avais-je vu, enfant, le Bassin du Commerce en eaux ? Et la gare de jadis, l'avais-je connue avant qu'on ne ferme la ligne ?
La maison de famille, vendue voici onze ans, s'ouvre de volets bleus qui la font souffrir. Je me souviens avec elle du gris perle d'avant, plus discret nous en convenons. Et le portail, blanc désormais, pourquoi ? Automatique, soit, mais blanc, mais pourquoi blanc ? Elle n'entrera pas.
Chaque demeure reconnue livre le nom de propriétaires - morts, dit-elle, et parfois elle se souvient des circonstances d'une fête. On dansait le dimanche à la ferme de la Grande Cour. D'autres noms au hasard des rues, méconnaissables de propreté. D'autres noms disparus.
Le clocher sonne de l'église où elle s'est mariée. Le cimetière où ses parents sont enterrés sous une dalle de marbre noir, elle y a sa place, elle me la rappelle, cette place qui reste dessous la lame c'est pour elle, à la sortie de cette ville où elle ne connaît que des morts.

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